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CORRECTION DNB BLANC JANVIER 2020

Partie I - Analyse et interprétation de textes et de documents et dictée – (60 points) 1h30
Partie II – Rédaction  – (40 points) 1h30

Partie I - Analyse et interprétation de textes et de documents – (50 points) 1h10

Le texte littéraire

Sur le terrain vague et sale et malade, où de l’herbe desséchée s’envase dans du cirage, s’alignent des morts. On les transporte là lorsqu’on en a vidé les tranchées ou la plaine, pendant la nuit. Ils attendent – quelques-uns depuis longtemps – d’être nocturnement amenés aux cimetières de l’arrière.
On s’approche d’eux doucement. Ils sont serrés les uns contre les autres ; chacun ébauche avec les bras ou les jambes un geste pétrifié d’agonie différent. Il en est qui montrent des faces demi-moisies, la peau rouillée, jaune avec des points noirs. Plusieurs ont la figure complètement noircie, goudronnée, les lèvres tuméfiées et énormes : des têtes soufflées en baudruche[1]. Entre deux corps, sortant confusément de l’un ou de l’autre, un poignet coupé et terminé par une boule de filaments.
D’autres sont des larves informes, souillées, d’où pointent de vagues objets d’équipement et des morceaux d’os. Plus loin, on a transporté un cadavre dans un état tel qu’on a dû, pour ne pas le perdre en chemin, l’entasser dans un grillage de fil de fer qu’on a fixé ensuite aux deux extrémités d’un pieu. Il a été ainsi porté en boule dans ce hamac métallique, et déposé là. On ne distingue ni le haut, ni le bas de ce corps ; dans le tas qu’il forme, seul se reconnaît la poche béante d’un pantalon. On voit un insecte qui en sort et y rentre.
Autour des morts volettent des lettres qui, pendant qu’on les disposait par terre, se sont échappées de leurs poches ou de leurs cartouchières. Sur l’un de ces bouts de papier tout blanc, qui battent de l’aile à la bise, mais que la boue englue, je lis, en me penchant un peu, une phrase : « Mon cher Henri, comme il fait beau temps pour le jour de ta fête ! » L’homme est sur le ventre ; il a les reins fendus d’une hanche à l’autre par un profond sillon ; on voit l’œil creux et sur la tempe, la joue et le cou, une sorte de mousse verte.
Une atmosphère écœurante rôde avec le vent autour de ces morts et de l’amoncellement de dépouilles qui les avoisine : toiles de tentes ou vêtements en espèce d’étoffe maculée, raidie par le sang séché, charbonnée par la brûlure de l’obus, durcie, terreuse et déjà pourrie, où grouille et fouille une couche vivante. On est incommodé. Nous nous regardons en hochant la tête. On ne s’éloigne que lentement. 
 Henri Barbusse, Le Feu, 1916.


[1]           Baudruche : ballon très léger.



Attention ! Vos réponses doivent être intégralement rédigées et s’appuyer sur le texte !
N’oubliez pas de citer le texte.

Questions de compréhension et d’interprétation

1.     Quelle est la scène décrite ? Quelle impression ressentent les hommes devant cette vision ?  (4 pts)
La scène décrite est une scène de carnage, de découverte de cadavres par des soldats de la première Guerre Mondiale (des poilus), de charniers… En effet, dès le commencement de ce texte, l’auteur nous informe : « Sur le terrain vague [] s’alignent des morts. » l.1 et 2. 

L’impression que ressentent les hommes devant cette vision est de l’écoeurement ou du dégout, les soldats sont « incommodés » mais semblent aussi hypnotisés par ce qu’ils voient : « On ne s’éloigne que lentement ». l .27

2.     Quelles couleurs dominent dans l’extrait ? Que symbolisent-elles ? (3 pts)
Noir : « cirage, noirs, noircie, goudronnée »
Rouge : « la peau rouillée »
Vert : « une sorte de mousse verte »
Jaune : « la peau jaune avec des points des noirs »

Ce sont des couleurs sales, couleur de la violence et de la mort, couleur du sang et du pourrissement des corps en décomposition, couleurs de la maladie…


3.     Dans le troisième paragraphe, par quelle métaphore le narrateur caractérise-t-il les cadavres ? Quel est l’effet produit ? (4 pts)

La métaphore qui caractérise les cadavres est : « Larves informes ». Les soldats ainsi animalisés ne sont plus des êtres humains, ils perdent toute dignité dans la mort, ils sont agglutinés, méconnaissables et rabaissés à n’être plus que des tas de larves. La métaphore est très péjorative, d’autant plus que l’animal évoqué est répugnant, « informe »…

4.     Relevez une personnification dans le quatrième paragraphe. Quel effet produit-elle par comparaison avec le reste de la scène ? (4 pts)
Dans le quatrième paragraphe, l’auteur personnifie les lettres : « lettres qui volettent, battent de l’aile à la brise ».Il s’agit du seul élément vivant dans ce décor macabre, ces objets normalement inanimés prennent vie et apportent un peu d’espoir. Il n’est d’ailleurs pas anodin que l’auteur souligne la couleur de ces lettres : « sur l’un de ces bouts de papier tout blanc », symbole de paix, de vie et d’espoir. Ces lettres symbolisent l’âme des morts et l’amour de leurs familles. Ainsi, l’évocation de ces lettres en ces termes est en contraste radicalement avec le reste du texte. 


5.     Sous la forme d’une réponse construite, précisez quelle vision a l’auteur de la guerre et par quels procédés il l’exprime. (8 pts) 

Méthode : dans ce paragraphe, il fallait rédiger une réponse construite, c’est-à-dire un paragraphe argumenté, afin de donner votre avis sur la vision de la guerre développée par l’auteur dans ce texte. Pour cela, vous deviez rédiger une introduction, un développement et une conclusion. Votre développement devait s’appuyer sur des procédés identifiés dans le texte (soit déjà évoqués dans les questions précédentes, soit d’autres procédés repérés par vos soins à la lecture : énumération, hyperboles, répétitions, champs lexicaux, métaphores, etc…) 
Voici une liste d’éléments que vous pouviez évoquer : 

  • Réalisme de sa description : précision des détails morbides, volonté de ne rien cacher de la violence de cette guerre et des corps en décomposition (« on voit un insecte qui en sort et y rentre »)
  • Dénonciation des conditions de la guerre 
  • Enfer de la guerre : choix des adjectifs qualificatifs péjoratifs, symbolisme des couleurs, métaphores animalisantes
  • Champ lexical de la mort
  • Gradation, énumération, hyperboles… 

Grammaire et compétences linguistiques

6.     Quel est le temps dominant de cet extrait ? Justifiez l’emploi de ce temps dans le texte. (5 pts)
Le temps dominant est le présent de l’indicatif.
Il s’agit d’un présent de narration utilisé ici pour rendre le récit plus vivant et l’identifier plus facilement à un témoignage réel. 

Bonus : « Mon cher Henri, comme il fait beau temps pour le jour de ta fête ! » = présent d’énonciation

7.     a) Observez l’emploi des pronoms personnels sujets. Quel est le plus utilisé ? Pourquoi selon vous ? (4 pts)
Le pronom personnel sujet le plus utilisé est « On ». Il désigne de façon impersonnelle le narrateur et ses amis, ainsi que les autres soldats qui s’occupent des corps. Ce « on » a une visée générale, ce qui permet de montrer les actions d’un groupe plutôt que d’un individu. 

b) « Il en est qui montrent des faces demi-moisies » l. 6-7 : que désigne le pronom  « Il » ? Comment appelle-t-on ce pronom ? (4 pts)

« Il » ne désigne personne, c’est ce que l’on appelle un pronom impersonnel. 

8.     « Nocturnement » : quelle est la classe grammaticale de ce mot ? Comment est-il formé ? Que signifie-t-il ? (4 pts)
« Nocturnement » est un adverbe formé à partir de l’adjectif qualificatif « nocturne » et du préfixe « -ment ». Il signifie « de nuit ». 

Réécriture (10 points)
Réécris le texte suivant en remplaçant « je » par « ils » et en faisant tous les changements nécessaires.

Dès les premiers coups de canon, ils ont été projetés en l’air, des masses de terre se sont soulevées sous eux et à ce moment-là ils ont perdu connaissanceIls retrouvèrent rapidement leurs esprits. Ensevelisenterrés vivants sous de lourdes masses de terre, dans quelques instants ils vont manquer d’air et ce sera la mort Ils se sont mis à crier […]. 
Extrait d’une lettre de Paroles de Poilus.

1 / bonne réponse
- 0,5 / faute de copie
- 0,5 / transformation supplémentaire


Dictée - Barème de correction (/10 points)

- 1 fautes grammaticales
- 0,5 fautes lexicales
- 0,5 pour 4 fautes de ponctuation



Dictée

 

Le silence se prolonge. Je parle, il faut que je parle. C’est pourquoi je m’adresse à lui, en lui disant : « Camarade, je ne voulais pas te tuer. Si, encore une fois, tu sautais dans ce trou, je ne le ferai plus à condition que toi aussi tu sois raisonnable. Mais d’abord tu n’as été pour moi qu’une idée, une combinaison née dans mon cerveau et qui a suscité une résolution ; c’est cette combinaison que j’ai poignardée. A présent, je m’aperçois pour la première fois que tu es un homme comme moi. J’ai pensé à tes grenades, à ta baïonnette et à tes armes ; maintenant c’est ta femme que je vois, ainsi que ton visage et ce qu’il y a en nous de commun. Pardonne-moi, camarade. Pourquoi ne nous dit-on pas sans cesse que vous êtes, vous aussi, de pauvres chiens comme nous, que vos mères se tourmentent comme les nôtres, et que nous avons tous la même peur de la mort, la même façon de mourir et les mêmes souffrances ? Pardonne-moi, camarade ; comment as-tu pu être mon ennemi ? »
E. M. Remarque, A l’Ouest rien de nouveau, 1928.


Partie II – Rédaction  – (40 points) 1h30
Le dictionnaire est autorisé pour cette partie de l’épreuve. 
Vous traiterez au choix le sujet A ou le sujet B. Indiquez sur votre copie le sujet choisi. 

Sujet A – sujet d’invention

Vous êtes un des personnages du tableau et vous racontez la scène que vous êtes en train de vivre. Insérez un dialogue et une description. 

Aide pour réaliser votre devoir
- Soignez la présentation de votre dialogue
- Votre description doit être précise et imagée : que voit votre personnage ? Que ressent-il ? Pourquoi ?
- Précisez la situation et prenez en compte le contexte historique
- N’oubliez pas de soigner votre style : métaphore, comparaison… et variez les types de phrase : interrogation, exclamation.
- Précisez l’issue (la fin) de cette situation. 

Sujet A

Invention /14
Emploi figures de style
Invention d’une situation cohérente et d’une fin logique
Evocation des sentiments et des émotions du personnage

Composition  /14
Présence et pertinence du dialogue (présentation, verbe de parole)
Présence d’une description précise et bien menée
Prise en compte du contexte historique

Langue /12
Synthaxe
Orthographe
Richesse du lexique
Variété des types de phrases employées

Sujet B – sujet d’argumentation
Vous écrivez un discours que vous prononcerez devant une assemblée de politiciens dans lequel vous plaidez la cause de la paix et tentez vos lecteurs de ne jamais faire la guerre . 

Aide pour réaliser votre devoir
- présentez votre devoir en respectant : introduction, développement, conclusion
- organisez la progression des arguments dans les paragraphes (du moins important au plus important)
- insérez des connecteurs logiques
- employez le registre pathétique en montrant la réalité de la guerre : utilisez des exemples empruntés aux textes étudiés en classe
                                          

Sujet B

Invention /14
Problématisation et évocation des réalités de la guerre
Pertinence des arguments et des exemples
Précision et richesse des exemples (tirés des textes étudiés en classe notamment)
Variété des procédés utilisés pour convaincre

Composition  /14
Présentation en paragraphes et articulation par des connecteurs logiques
Introduction / conclusion structurées 
Présence d’arguments et d’exemples

Langue /12
Synthaxe
Orthographe
Richesse du lexique
Variété des types de phrases employées